lunes, 14 de marzo de 2011

SÍ, UN PUEBLO DE SEÑORES

Editorial du "Monde"

Une leçon de dignité dans un malheur immense

LEMONDE | 14.03.11 | 13h24 • Mis à jour le 14.03.11 | 13h49

Il y a le nombre de victimes, plus de 10 000 déjà. Il y a le nombre de réfugiés : plus d'un demi-million. Il y a l'ampleur de la dévastation matérielle, encore incalculable, assurément immense. Il y a le choc économique et financier, majeur. Il y a l'insupportable attente : une autre secousse est possible d'ici au mercredi 16 mars.

Il y a, enfin, la frayeur nucléaire, la menace de radiations mortifères dans un pays qui n'est, de ce point de vue, pas tout à fait comme les autres, puisqu'il est le seul à avoir subi l'épreuve du feu atomique.

Et, pourtant, des récits, des images, des témoignages qui nous parviennent, de ce que disent nos correspondants, on retiendra ceci : la démonstration de sang-froid ; le calme, une manière d'être solidaires qui semble aller de soi. Il y a cet immense malheur, bien sûr. Et puis il y a la dignité des Japonais.

"Le Japon fait face à sa plus grave crise en soixante-cinq ans, depuis la seconde guerre mondiale", a dit Naoto Kan, le premier ministre. Aucune exagération dans son propos.

Chaque heure qui passe conduit à réévaluer le bilan des morts et des blessés. Chaque heure fait découvrir l'étendue des destructions provoquées par la tragédie du vendredi 11 mars : un séisme d'une amplitude majeure - les Japonais l'estimaient lundi à 9 -, suivi d'un tsunami monstre - des vagues de plus de 10 mètres de haut. C'est toute une partie de la région nord-est du pays qui a été ravagée.

Mais, à la dévastation provoquée par la nature s'est ajouté un drame qui, lui, ne doit qu'aux hommes : la possibilité d'un accident nucléaire majeur. Le choc sismique de vendredi a endommagé la centrale de Fukushima, en bord de mer, à 240 kilomètres de Tokyo.

Des incidents ont été détectés dans au moins deux des réacteurs ; des particules radioactives ont été disséminées dans l'environnement. Lundi, les autorités luttaient pour assurer le refroidissement des installations de Fukushima et empêcher une fuite radioactive de grande ampleur.

Les jugements tranchés sur l'avenir du nucléaire civil viendront plus tard. Mais, avant même qu'on puisse tirer les leçons de ce qui s'est passé à Fukushima, on est en droit de poser des questions. Quels sont les risques inhérents aux centrales construites en bordure de mer ? Pourquoi, alors que le nucléaire civil est de nouveau en vogue, les standards de sécurité édictés par l'Agence internationale de l'énergie atomique ne sont toujours pas obligatoires ? Enfin, quand les risques sont si importants, faut-il s'accommoder du goût du secret et de l'opacité qui caractérisent trop souvent les opérateurs de centrales nucléaires ?

Le fardeau qui pèse sur le premier ministre est énorme. "La capacité du Japon à se relever dépend de chacun d'entre nous", déclarait-il dimanche à ses concitoyens.

L'épreuve touche un pays qui doute, en proie à une crise de confiance qui dure depuis un quart de siècle - Etat lourdement endetté, classe politique à bout de souffle. Le Japon traverse un moment "churchillien".

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